Les petits écrivains
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 Crystal

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ginie
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MessageSujet: Crystal   Crystal Icon_minitimeLun 2 Juil - 7:54

prologue : Une journée finalement tranquille

Chapitre 1



Emma s’installa confortablement dans son fauteuil, calée entre deux gros coussins. Soucis du détail : elle avait pris soin de mettre à disposition sa bouteille d’eau, son briquet, habitude prise depuis fort longtemps, aujourd'hui complètement superflue, et son pêché mignon : un carré de chocolat. Celui-ci était en équilibre précaire sur l’un des coussins mais devait attendre encore le moment propice. Il y avait des règles à respecter dans l’art et la manière de savourer ces instants.
La jeune femme ne pu s’empêcher de sourire en attrapant la manette. Elle avait attendu toute la journée ce moment et elle jubilait. Grande amatrice de jeu vidéo, elle affectionnait tout particulièrement le genre aventure / jeu de rôle, et celui-ci avait tous les atouts pour devenir son numéro 1, enfin peut être pas devant certains opus comme Final Fantasy VII ou le XII, mais qui sait....
Un sourire aux lèvres, elle appuya sur la touche -Start- de sa manette de jeu. Sa console SONY 2 ronronna doucement et l’interface apparut à l’écran : ‘Crystal’.
Ce titre la séduisait tout autant que le générique de début. Elle voulait le revoir. En règle générale, après un premier visionnage, elle zappait aussitôt et jouait directement; mais pas avec cette petite merveille en 3D. Des graphismes somptueux, une ambiance héroïque fantasy (plein de magie et de dragons !), des personnages charismatiques et hauts en couleur, tous les ingrédients nécessaires pour séduire Emma.
-« Trop bien !»
Cette dernière trépignait, engloutie dans son confort.
Elle savait qu’elle parlait souvent toute seule, mais cela l’amusait plus qu’autres choses. Après tout, sa journée finie, le soir rimait avec solitude ; peut être se rassurait-elle ainsi… Son planning journalier était très serré et l’organisation rigoureuse. Une journée comme celle qu’elle venait de passer, bringuebalée entre son travail, l’école, les tâches ménagères, etc, était harassante mais somme toute monnaie courante. La météo annonçait encore pour demain plus de 35 degrés à l’ombre, et son poignet plus que son dos hurlait à tue tête la mélodie de la douleur. Oui. Finalement, l’arrivée inopinée de ce divertissement était une bonne chose, ça lui permettrait de s’évader un peu.
Elle n’avait néanmoins strictement rien compris à la présence de ce jeu, dans sa boîte aux lettres ce matin.
Le paquet déjà était bizarre. Le papier était sobre et l’écriture un peu vieillotte mais surtout il y avait là trois plus de timbres qu’il n’aurait fallu. Emma avait alors haussé les sourcils et fait la moue : elle n’aimait pas trop ce genre de gags. Aucun expéditeur sur le colis, le cachet d’expédition illisible, mais le nom et l’adresse de la jeune femme étaient clairement notés. Un voile obscurcit son regard. Les mêmes questions restées depuis si longtemps sans réponses avaient du ressurgir sans avoir pris la peine de s’annoncer. Emma ne les laissa pas s’imposer et les chassa de suite. Une apaisante bouffée d’air la soulagea. Vive le yoga !
Elle resta peut être quelques secondes à réfléchir encore un peu puis haussa les épaules et déchira le papier. Les yeux ronds d’étonnement, elle y découvrit un jeu vidéo. Ca faisait tellement longtemps qu’elle n’avait pas joué à quelque chose de nouveau, qu’elle ne résista pas. Elle l’observa de plus près.
Déjà, il s’agissait d’un jeu adapté pour sa console de salon et « Ô joie ! » en français. Ensuite, la jaquette était modeste mais attirante : au centre d’un ciel étoilé, on voyait un cristal qui ressemblait à du quartz et au dessus le titre joliment calligraphié. Mais ce qui l’hypnotisa le plus, ce fut le regard à l’arrière plan. Enigmatique, perçant, dangereux, les adjectifs ne manquaient pas. Puis, quand elle tourna le boîtier, elle fut tout de suite séduite par les trois images présentées. Les captures d’écran dévoilaient certains aspects du jeu et tout de suite les graphismes travaillés à l’extrême lui plurent. Sur l’une d’elles, se trouvaient deux personnages charismatiques. L’un était un homme bien proportionné, épée sur le côté et rendu du regard étonnant. L’autre était une femme, vêtue de façon complètement différente, à la citadine dirait Emma, et qui n’avait pas l’air très contente. Si en plus l’humour était de mise, la jeune femme passerait certainement de très bons moments. La deuxième montrait une créature fantastique, mi-lion mi-dragon, et qui était auréolé d’éclairs. La dernière présentait une séquence de combat, et d’après ce qu’elle pouvait voir, le système de jeu avait l’air simple à maîtriser, ou tout du moins, elle le connaissait déjà.
Qui avait bien pu lui envoyer ça ? Elle approcha le boîtier de son regard inquisiteur mais comme elle s’y attendait aucune réponse ne lui fut donnée. Elle pensa tout d’abord à des amis mais elle pouffa, mi résignée, mi ironique. Quelle idée ! Elle n’avait pas d’amis. De la famille ? Non plus. Que devait-elle faire ? Le garder ? Le rendre ? Oui, mais à qui ?
S’étant épuisée au travail en cette matinée déjà étouffante, et sachant que la journée était loin d’être finie, elle décida de faire court. Se rappelant qu’elle avait déjà commandé par Internet, pouvait-on penser qu’il y avait eut erreur de destinataire ? Elle en doutait mais après tout, pourquoi pas ! Elle opta pour la solution de facilité : garder le jeu et attendre qu’on le lui réclame. Elle jeta un dernier coup d’œil sur la boite et afficha un très large sourire. Ignorer ce jeu serait une hérésie !
Aussi, elle était rentrée chez elle et elle profita de l’heure de battement qu’elle disposait. Elle avala à la va vite les restes d’hier soir tout en allumant sa console. Même si elle ne jouerait pas maintenant, elle pourrait apprécier la démo.
Elle l’avait visionnée deux fois et elle aurait été tentée par une troisième lecture, si le temps ne jouait pas contre elle. Pour l’heure, elle devait retourner à sa vie civile et se dépêcher d’aller travailler.


***
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ginie
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MessageSujet: Re: Crystal   Crystal Icon_minitimeLun 2 Juil - 7:55

Voilà ! Emma avait attendu ce moment tout l’après midi, impatiente. Matérialiste, elle ne négligeait cependant pas l’origine de ce présent. Si jadis elle manifestait beaucoup d’enthousiasme aux surprises, elle en avait aujourd’hui une sainte horreur. Mais elle refusa de se laisser emporter une nouvelle fois et maîtrisa ses émotions. Elle se mura dans sa défense et se concentra sur une chose : prendre du bon temps.

Et ce soir, elle pouvait enfin jouer à ‘Crystal’ et découvrir les protagonistes principaux.
-« Waaaa, je suis trop contente, il a l’air sublime ce jeu !! »
Quand l’écran devint noir, elle se tut immédiatement et se redressa. Ses yeux fixèrent son téléviseur, avides une fois de plus.
Au commencement, l’obscurité. Puis une lueur. D’abord hésitante, elle semblait se rapprocher inexorablement. L’on distinguât les contours, que les silhouettes entremêlées d’un lion et d’un dragon s’enroulèrent autour d’un cristal d’où émanait la lumière. Cela s’approchait indubitablement et le corps d’une jeune femme apparut à l’intérieur.
Le rythme s’accéléra soudain. La force d’attraction du cristal semblait augmenter de façon exponentielle. Les plans caméra soutenaient ces effets en reproduisant l’aspiration et la vitesse. Certains diraient peut être que la démo était un peu trop ‘facile’, mais quoi qu’on en dise, Emma se sentait happée par l’histoire instantanément et pour sa part, elle en était ravie.
Ensuite donc, lorsque le joueur, témoin et acteur, effleurait le cristal, celui-ci explosait en une myriade de fragments scintillants.
Les plus petits morceaux furent dispersés en une pluie d’étoiles. Les débris les plus imposants, quant à eux, commencèrent à décrire une orbite commune. Tous se distinguaient par leurs couleurs, leurs lumières, leurs contrastes. Lorsque la caméra immergea dans chacun, les paysages les plus chamarrés se succédèrent : des collines verdoyantes aux tapis de forêts, des plaines au désert gris, de la terre rouge des volcans aux sommets enneigés. Le panel de la faune et de la flore étaient tout autant diversifiés et offraient un régal pour les yeux.
Emma adorait cette présentation flamboyante. La beauté du jeu la subjuguait. La saisie des détails au pixel près l’impressionnait beaucoup. Qu’il était agréable de faire évoluer son personnage dans un monde aussi remarquable ! De plus, les protagonistes étaient tout autant stylisés. L’histoire avait l’air sympathique quoiqu’un peu compliquée, le synopsis était assez vague et imprécis. Mais cela ne décourageait nullement Emma. Au contraire, elle aimait les « trucs pas droits tout tordus », cela l’obligeait à réfléchir et à relever des défis.
-« 5 ! » murmura-t-elle. Par réflexe, elle avait comptabilisé le nombre de débris visités.
Puis, la caméra s’éloigna, et le gros plan montra les fragments se rapprocher et fusionner en un … cristal.

La démo prenait fin et seulement à ce moment là, une paire d’yeux apparaissait au dernier plan. Au début, cela n’avait nullement gênée la jeune femme. Mais à chaque fois, l’impression d’être épiée la titillait. C’est vrai qu’il était impressionnant ce regard. Le même que celui qui se trouvait sur la jaquette. Heureusement que son propriétaire était virtuel !
Cette vague sensation de malaise s’évaporait vite de son esprit lorsque quelques milli secondes plus tard, le jeu enchaînait. L’écran devenait blanc et un message apparut : -« Va ! »
-« Et comment ! »
Emma raffermit sa prise sur son joystick et en une succession de gestes habituels, elle appuya sur les commandes et chargea sa partie. La jeune femme était aux anges. Ce jeu était sa seule distraction et après une dure journée comme celle-ci, elle méritait bien un peu de repos et d’évasion. Penser à autres choses, oublier ses ennuis, faire abstraction de cette douleur omniprésente dans ses articulations. A 30 ans, elle pensait déjà avoir dépassé la limite de consommation. Mais elle gardait le moral. Pas question de se laisser morfondre et de perdre le sourire à cause de ça ! Elle contrôlerait sa souffrance. Il le fallait bien de toute façon.

L’histoire commença. Elle avait hâte d’en voir un peu plus et elle ne fut pas déçue. Le générique du début n’était qu’une mise en bouche.
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MessageSujet: Re: Crystal   Crystal Icon_minitimeLun 2 Juil - 7:55

Chapitre 2



Les premières images apparurent. La scène se déroulait dans une maison d’époque contemporaine. De décoration simple et modeste, la pièce représentait le salon. Une jeune femme s’y trouvait, assise dans un fauteuil, livre en main. Soudain, sorti de nulle part, un homme apparut, épée à la main. Le travail sur le rendu des personnages était magnifique. Les cheveux, les vêtements, les mouvements, tout était fluide et naturel. Leurs visages étaient très bien faits et les expressions affinées.
Sans sommation, il l‘empoigna et la traîna de force à sa suite. Ils quittèrent la maison et atteignirent les portes de la ville assez rapidement. Leur but : la forêt. Les rues étaient désertes malgré cette matinée radieuse, et pour le joueur, il suffisait de pousser le joystick à fond en avant. Pas de combats mais une ombre menaçante était à leur trousse. Une ombre maléfique. Une ombre vivante, dont les tentacules de noirceur phagocytaient la moindre parcelle d’espace-temps. Le soleil disparaissait derrière de gros nuages sombres, puis l’obscurité s’emparait du paysage à jamais.
Le ton était donné.

Lorsque le jeu commença vraiment, la maniabilité et la fluidité finirent de convaincre notre joueuse.
-« Wouahhhh ! Vraiment, quelle aubaine ! » S’exclama-t-elle enjouée.
Elle rencontra quelques monstres : des bêtes moitié loup moitié sanglier, des serpents gigantesques ou bien encore des mouches géantes venimeuses. Le concept du jeu, très pédagogique, donnait le personnage principal masculin comme vainqueur à chaque combat. Celui-ci profitait des attaques qu’il donnait, pour transmettre les instructions nécessaires pour se battre. Il lui expliquait comment dégainer, attaquer, se défendre ou bien encore se servir d’un objet ou se soigner.
Emma apprenait à contrôler son personnage : Dame Ewalyne et s’amusa ainsi pendant deux heures.
Quand l’image d’un futur animal à combattre s’afficha à l’écran, elle décida de sauvegarder et d’aller se coucher. Ce monstre avait l’air bien plus costaud que ceux d’avant ! D’ailleurs, jusqu’à présent, aucune image représentant une créature n’était apparut sur l’écran en guise d’avertissement. Demain, même si elle ne travaillait pas, elle devrait quand même se lever tôt. Ce boss allait lui prendre du temps et il fallait qu’elle écoute la voie de la sagesse, la voie de la raison. La jeune femme ne put réprimer un soupir de dépit malgré tout.
L’écran tressauta plusieurs fois et la même image de la bête réapparut. Cela surprit Emma, elle pensa aussitôt à un dysfonctionnement du jeu ou de sa console. Son sourire s’effaça instantanément à cette pensée, ses sourcils se froncèrent. Elle se souvint alors d’avoir déjà vu cette créature sur la jaquette du jeu. Un personnage important de l’histoire ? Cela expliquerait ces apparitions soudaines.
La jeune femme haussa les épaules : à chaque jour suffit sa peine. Elle sauvegarda rapidement et quitta sa partie. Il n’était pas très tard mais elle baillait déjà à s’en décrocher la mâchoire. Tout en s’extirpant de son fauteuil, elle fixa du regard sa console espérant voir s’afficher en lettres lumineuses : « Je vais bien ! ». De quel artiste déjà était cette expression : « Il n’y a que l’homme bourré pour tenir une conversation avec des objets » ? …Et dire qu’elle n’avait rien bu …
Elle s’approcha de la machine, attentive aux moindres bruits. Elle l’éteignit avec prudence. Sa console de jeu devenait susceptible avec l’âge et la moindre poussière pouvait la contrarier. Si anomalie il y avait, autant que ce soit le disque que cette dernière. Aucun son suspect ne l’interpella. Après tout, elle marchait bien depuis ce jour, c’était peut être le jeu finalement. Même si elle avait sauvegardé le bug, avec un peu de chance, il s’agirait d’un problème ponctuel, résolu au passage du chiffon sur le disque. Elle pourrait très bien recommencer du début ; elle n’était pas allée bien loin dans l’histoire. Et si vraiment le jeu ne fonctionnait pas du tout, et bien elle s’en remettrait, car ce n’était qu’un jeu après tout.
-« Ce serait bien dommages quand même. » conclut-elle en rangeant sa manette.


Emma prit la direction de son lit, mais avant tout : le rituel du soir.
Délicatement, elle ouvrit la porte de la chambre d’à côté et passa la tête par l’entrebâillement. Aucun bruit. Seule une respiration sereine et régulière lui parvenait. Un large sourire apparut sur le visage de la jeune femme.
A pas de loup, guidée par le peu de lumière qui filtrait maintenant par la porte ouverte, elle s’avança et se posta devant le lit. Emma se pencha un peu plus et détailla ce petit bonhomme endormi. Allongé de tout son long, son doudou, coincé entre son cou et son bras, lui servait de coussin. Le pouce encore dans la bouche, il tétait machinalement, bien qu’il fût profondément endormi. A ce spectacle si attendrissant, qui ne la lasserait jamais, Emma soupira d’aise. Son fils. Son petit bonhomme. Une source inépuisable de bonheur et de réconfort.
Elle le regarda encore quelques instants puis recula et referma la porte derrière elle.
Il était bien vingt deux heures passées quand elle se posa dans son lit. La tête à peine posée sur l’oreiller et Morphée l’emporta dans ses bras.


***
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MessageSujet: Re: Crystal   Crystal Icon_minitimeLun 2 Juil - 7:56

-« sssssSSSSSS …. »
Le sifflement s’amplifiait, se rapprochait. Il s’accompagnait d’un léger frôlement sur la peau. Ca glissait ? Non, une caresse. Emma ouvrit lentement les yeux. La première chose qu’elle vit, à travers ses paupières mi-closes, fut -verte- ! Du vert de partout. Des arbres, plein d’arbres, de l’herbe, des fourrés,… Elle aimait la nature mais elle n’avait jamais songé à décorer sa chambre style -forêt-. Ensuite, lorsqu’elle réalisa qu’une ombre se mouvait pas plus loin que sur son nez, elle sursauta et fit un bond impressionnant.
-« Kyaaaaaa ! »
Elle recula sur son séant aussi loin qu’elle le put puis se figea et réussit tant bien que mal à déglutir. Un serpent se faufilait dans l’herbe, cinq mètres devant. Il était tout petit et d’un vert éclatant. Si ses yeux ne pouvaient se détacher de l’animal, elle l’aurait déjà perdu de vue.
Emma se passa une main nerveuse dans ses cheveux. Un soupir interminable s’échappa de sa bouche.
-« Et bien ! Tu peux te vanter de m’avoir filé une frousse du diable ! »
La jeune femme se força à rire mais seul un ricanement rauque s’échappa de sa bouche. Elle observa le reptile jusqu’à sa disparition totale. Elle ne se sentait pas la force de se mettre debout, ses jambes la trahiraient sûrement, mais les battements de son cœur s’apaisaient. Elle était plutôt pacifiste, tolérante, avec les petites bêtes de ce genre mais qu’aucune ne s’avise à franchir son espace vital. Déjà qu’elle sursautait à la vue d’une abeille, alors un serpent !
Pas tout à fait rassurée mais décidée à ne pas attendre qu’il revienne avec quelques uns de ses complices, elle scruta les alentours. Sa première impression était la bonne : que du vert ! Elle ne pouvait pas être ailleurs que dans une forêt, ça déjà, c’était une évidence. La jeune femme battit des paupières plusieurs fois et se gratta la tête. Pourquoi ? Comment ?
Elle se souvenait très clairement de s’être couché après avoir joué à Crystal et … Emma leva les yeux et mains au ciel. Et voilà l’explication ! Elle s’était tellement immergée dans l’univers du jeu qu’elle en rêvait. Très réel certes, mais un rêve quand même. Evoquer l’enlèvement par des martiens écolo ne la contentait pas plus que ça de toute façon. Alors, quoi d’autres ?
La jeune femme ferma les yeux et respira profondément. Elle remarqua tout de suite l’absence totale d’odeur. Rien de grave à tout ça, cela lui était déjà arrivé. De plus, il était difficile, en général, de faire la part des choses entre le réel et l’inconscient, mais dans ce cas précis, elle avait vraiment la certitude de crapahuter dans ses songes. Sa lucidité en était peut être la preuve.
Pour retrouver un minimum de contenance, elle entreprit de se redresser. D’un geste machinal, elle épousseta ses vêtements. Le choc passé, elle s’occupa l’esprit en faisant le bilan de la situation.
-« Bon alors, récapitulons : je suis dans mon rêve. Voilà, ça c’est dit. Complètement absurde mais j’assume. Ensuite : je ne sens rien et je ne sais pas s’il fait froid ou chaud. A la rigueur, tant mieux. Où je suis ? Une forêt. Avec qui ? Des copains serpents. Super … La trouille de ma vie… »
D’un geste coutumier, manie prise depuis fort longtemps, elle remit une de ses mèches de cheveux derrière l’oreille.

-« ssssSSSSSSSSS. Rêve ou pas, la Peur reste elle-même. »
Emma stoppa net son geste. Lentement, elle leva la tête. Sa bouche s’ouvrit sous le coup de la surprise puis ses membres tremblèrent de terreur.
La tête d’un serpent dépassait d’une touffe d’herbe. Une tête qui devait être plus grosse que la sienne !
Il se redressa de toute sa hauteur, 7 voire 8 mètres, et la toisa de son regard inquisiteur.
Le petit vert a pris sa dose d’amphétamines, dirait-on !
Rêve ou pas, Emma ne se sentait pas assez courageuse pour oser combattre ce reptile mutant. Et lorsque ce dernier amorça un très léger mouvement, elle fit d’instinct un pas en arrière. Cette impulsion suffit à décharger toute l’adrénaline accumulée dans la moindre parcelle de son corps. Elle prit ses jambes à son cou et courut le plus vite et le plus loin qu’elle put.

A bout de souffle, épuisée et ruisselante, Emma s’arrêta uniquement parce que son corps ne pouvait poursuivre. Vraisemblablement, elle avait semé ce … cette créature. Rien à voir avec ces boas constrictors qu’on admirait dans les reportages animaliers. Non, cette bête, déjà, avait le mérite de savoir parler, ce qui n’était pas négligeable. Et en plus cela ressemblait plus à un serpent des temps préhistoriques, avec cette tête reptilienne et rocailleuse, qu’à la petite vipère des champs.
Que devait-elle faire maintenant ? Se calmer tout d’abord.
Elle s’abstint de s’asseoir sans avoir observer les alentours. Autour d’elle, la forêt se dispersait quelque peu pour s’ouvrir en une petite clairière. Le soleil perçait à travers les feuillages épars, que les rayons auréolaient d’une douce lumière. Les dégradés de verts se mêlaient aux couleurs panachées des fleurs ; les arbres, gardiens éternels, dominaient majestueusement les lieux. Ambiance éthérée, décor magnifique.
Cependant, elle n’eut pas le temps d’apprécier le paysage dans ses moindres détails. Et pour cause : un dragon fonçait droit sur elle. Un dragon de six mètres de haut, tout en écailles aiguisées et en griffes acérées.
Emma voulut crier mais aucun son ne parvenait à s’extirper de sa gorge. Elle distingua nettement ses crocs en feu, sa gueule béante, sa mort prochaine. Et si auparavant, la peur l’avait transportée dans sa fuite, autant, à cet instant, ses jambes ne lui obéirent plus. Elle tenta de reculer mais ses pieds s’emmêlèrent. Elle tomba à la renverse. Le souffle coupé, elle sentit ses entrailles se contracter furieusement. Pouvait-on mourir dans son propre rêve ? Aussi curieusement que cela puisse paraître, elle se souvint du film Matrix. Oui, l’esprit pouvait très bien s’emballer et faire croire que ....Coupant court à ses divagations tourmentées, une ombre gigantesque obstrua son champ de vision. Emma tenta de discerner les contours de cette silhouette mais elle était bien trop imposante. Un éclat éblouissant zébra le ciel suivit d’un bruit de tonnerre assourdissant. Par instinct de survie, la jeune femme se couvrit le visage et se ramassa sur elle-même.
Un cri strident, un dernier râle puis le silence. Sur le coup de la surprise, elle resta figée, maîtrisant précairement la panique qui la submergeait.
-« Que faites-vous là ? » fit une voix caverneuse, profonde.
Aucune antipathie dans cette question, cela rassura quelque peu Emma. Toutefois, aucune trace de sympathie joviale et bon enfant n’était décelable pour autant.
Elle jugea qu’il n’était pas très bon pour sa sécurité de rester dans sa position. Pour appréhender le danger, il y avait mieux que rester en boule sur le sol, le visage enfoui dans ses bras. Elle leva prudemment la tête. Le contre-jour fit qu’elle ne put discerner les traits précis de son interlocuteur. Et de toute façon, ce … cet individu ? , cette créature ? , enfin qui ou quoi que ce soit, dépassait de très haut son champ de vision.
Quitte ou double. Ami ou ennemi ? La carcasse du dragon un peu plus loin derrière prouvait qu’il avait eu la charité de lui venir en aide. Cela dit, rien ne lui prouvait qu’il n’aille pas faire de même avec elle. Elle se racla la gorge et décida de lui répondre, tout simplement.
-« Je rêve. »
C’est en prononçant ces mots, qu’Emma réalisa une erreur possible. N’allait-il pas lui cracher à la figure qu’elle se fichait de lui ? Elle se leva immédiatement, prête à toutes éventualités.
Puis, voulant éviter le quiproquo, elle ouvrit la bouche dans la ferme intention de lui expliquer ce qu’il en était quand il prit la parole avant elle.
-« Déjà ? »
La jeune femme referma la bouche aussi sec et figea son expression quelques secondes. Comment ça ‘déjà ?’ ? Qu’est-ce qu’il était en train de raconter ? Emma profita du silence pour réfléchir aussi rapidement qu’elle le pouvait. Finalement, pas la peine de s’en faire. Un rêve, à la base, ce n’est pas très cohérent. Et pas dangereux…enfin l’espérait-elle. Et en attendant qu’elle se réveille, elle ne voyait pas d’autre solution pour sortir de ce monde, entamer une conversation avec … Machin… semblait inévitable. Elle leva la tête, et faisant mine d’avoir capter son regard, perdu dans les ombres et contrastes, elle avança :
-« Je vous avoue que je ne vois pas trop de quoi vous parlez, … euh… Monsieur….euh…hum… »
Sa phrase de perdit dans un petit toussotement. Elle perdit de son assurance lorsque la Bête grogna. Elle s’empressa de changer de sujet :
-« Je … je vous remercie de m’avoir sauvé la vie. Ce dragon n’avait pas l’air d’avoir un sens de l’humour très développé et …euh…enfin…si vous n’étiez pas intervenu, je ne serais plus là, je crois. Je…Je ne sais pas ce qu’il se passe. Je sais que je rêve. »
La jeune femme, enhardie, continua sur sa lancée :
-« Je me suis couchée hier soir après une petite séance vidéo-ludique, pour employer des mots savants, et maintenant je suis là. Peut être que si je n’avais pas rêvé du serpent, je serais en train de rêver à des petits papillons. Mais au lieu de ça, je suis coincée ici en attendant que je me réveille de moi-même ou attendre que le réveil matin s’enclenche. »

Le géant ne dit rien mais il s’accroupit. Son agilité et sa rapidité surprirent Emma qui se retrouva soudainement face à lui. Elle recula d’un pas mais de suite, ses yeux l’hypnotisèrent. D’un bleu vert subtilement mélangé, il se dégageait de ce regard une vive intelligence et une sagacité pénétrante.
-« Veuillez pardonnez mon empressement. Les bienséances tout d’abord. Je me présente : Lord Marthym » déclara-t-il de sa voix grave.
Tout un panel de sensations s’empara de la jeune femme. Elle se trouvait en présence d’un … d’une … enfin d’un animal, d’une créature mi lion, mi dragon semblerait-il.
Sa tête ressemblait à celle d’un fauve, d’un loup, mais aux traits plus puissants, plus racés. Deux cornes menaçantes s’érigeaient derrière ses oreilles pointues. Sa fourrure acajou, semblait douce et soyeuse. Sa crinière, semblable à des cheveux, s’arrêtait à mi dos, et de longs poils recouvraient le visage, le menton, le cou et toute la poitrine. Ses quatre pattes avaient par contre un pelage beaucoup plus ras et beaucoup plus clair. Ses bras, tatoués en motifs alambiqués, se terminaient par des paluches énormes aux griffes acérées mais heureusement rétractables. On aurait dit une grosse peluche, pensa Emma ; enfin si on excluait bien entendu la série de crocs qui ornaient la gueule, déjà majestueuse, de la bête… De plus, certains détails ne trompaient pas. Emma avait reconnu la silhouette d’un dragon aux premiers abords et pour cause. Ses cornes tout d’abord, de taille moyenne mais robustes, on y distinguait des ciselures travaillées. Sa paire d’ailes membraneuses était couleur rouge sang et d’une envergure appréciable. Et dans la continuité de ses cuisses musclées, des griffes, telles des serres redoutables, ponctuaient la description.
La jeune femme sentait quelque peu son assurance fléchir devant ce monstre de muscles et de poils. Songe ou pas … Et au plus profond d’elle-même, elle comprit que ce n’était ni un animal monstrueux ou même un humain, mais bien plus que cela. Elle se reprit bien vite en revenant sur son idée principale : elle n’était que dans un rêve.
-« Euh…Enchantée. » articula-t-elle
Puis, pensant qu’il serait de bon ton de continuer dans la politesse, elle continua sur sa lancée, non sans parodiant quelques formulations cueillis au hasard dans sa mémoire :
-« Je suis Emma de Govirs, fille d’Aymeric Le Gwen »

Marthym esquissa un sourire. Mais une ombre d’anxiété masqua bien vite son regard :
-« Nous sommes aux frontières de l’urgence dirait-on. Emma, fille d’Aymeric, il sera bientôt temps.
Le temps s’accélère, les changements s’opèrent. Vous avez déjà du voir ou ressentir les premiers symptômes, je suppose. Vous allez bientôt renaître Dame Ewalyne. »
Les yeux d’Emma s’agrandirent d’étonnement mais se souvint aussitôt du nom du personnage principal de son jeu et ne prit pas garde au changement d’expression de son interlocuteur. Celui-ci affichait un visage grave et annonça :
-« Je ne me souviendrais pas de cette conversation, aussi retenez bien ce que je vous dis. Ne perdez jamais la foi que vous portez en votre fils. Elle seule vous sauvera. »
-« Maman ! »
Emma tourna la tête vivement au son de cette voix si familière. Marthym disparut. Tout son environnement s’obscurcit.
-« Maman ? » reprit la voix fluette.
La jeune femme s’agita. Elle avait l’impression désagréable de ne pouvoir agir, de ne pouvoir contrôler son corps. Impossible de crier même si les mots se ruaient à ses lèvres. Immobilité totale alors qu’elle ne souhaitait que courir. Il faisait noir et elle prit peur.


-« Mamaaaaaann !!! »
Emma ouvrit les yeux. Un flot de lumière heurta douloureusement ses rétines. Pire, une petite tornade vivante grimpait déjà sur le lit et s’assit à côté d’elle, doudou à la main, tout sourire.
-« B’jou Maman. A va ? »
Celle-ci eut du mal à reprendre ses esprits tout de suite. Elle hésita quelques instants, tentant de se réveiller complètement. Il était temps de penser à cette journée et de mettre à plus tard l’explication de ce rêve, ou de tout simplement l’oublier. Et puis comment ne pas craquer face à ses yeux pétillants et à ce sourire coquin. Elle respira une bonne bouffée d’air et se détendit.
-« Ca va mon poussin. Et toi, tu as bien dormi ? »
Ignorant totalement la question, il se glissa près de sa mère et s’exclama :
-« Câlin ! »
Ils partagèrent ainsi quelques instants de complicité unique avant que la journée ne commence.
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MessageSujet: Re: Crystal   Crystal Icon_minitimeLun 2 Juil - 7:56

Chapitre 3


Et elles étaient millimétrées ses journées. Elle emmenait son fiston à l’école, puis allait travailler toute la journée jusqu’à la sortie scolaire. Evitant au maximum de vaquer aux besognes routinières, telles les courses ou la lessive, devant son fils, elle profitait de la demi-heure, ou de l’heure entière, dont elle disposait à midi, pour effectuer ces tâches ménagères. Emma avait eu la chance de trouver un travail juste à côté de chez elle, ainsi s’économisait-elle une voiture. L’école était à proximité et les horaires correspondaient, la seule bonne chose de sa nouvelle vie.
Vivant seule avec son fils, elle devait maintenir son foyer en dehors des problèmes financiers, et ce n’était pas chose aisée. Elle avait du tout vendre, de l’ordinateur aux livres ou magazines divers. Elle qui aimait tant les bidules et les trucs hi-tech, n’avait gardé que sa console vidéo, qui ne valait plus rien face à l’émergence des consoles dernières générations sorties, son gros téléviseur à tube cathodique et sa platine DVD, qui elle aussi avait subit les affres du temps. Suite à son déménagement, pour un appartement plus petit, elle en avait profité pour vendre aux enchères ses meubles. Elle n’avait gardé que le strict nécessaire ou ce qui n’était plus vendable.
Et elle avait aussi changé de métier, pour des raisons de proximité. A l’origine, elle était laborantine. Elle aurait rêvé de travailler pour la police technique et scientifique, entrelacer sa passion des analyses, de la recherche et de tout ce qui à un rapport avec la nouvelle technologie. Elle se souvenait de ses envies de famille nombreuse aussi. Mais la vie en avait voulu autrement et aujourd’hui, elle était caissière dans une épicerie, et sa famille s’était brisée il y a trois ans. Trois ans qu’elle était seule. 3 ans dans 6 jours pour être exacte. L’âge de son fils. Quelle ironie !
Mais Emma refusait de se laisser abattre. Pas pour elle mais pour son fils. Elle se devait de poursuivre et de survivre. Car sans lui, serait-elle encore là ?
Lorsque la jeune femme sortit de son appartement, la main de son garçon serrée dans la sienne, elle sentit toute la chaleur de ce contact et son sourire s’élargit de plus belle. Vendredi, dernier jour de la semaine.
Demain, week-end ! Emma était ravie, cette semaine avait été fatigante et un peu de détente ne lui ferait pas de mal. Piscine avec le fiston et séance de jeu vidéo le soir. Le pied !
Elle accompagna son fils à la maternelle, lui apprenant une nouvelle comptine sur le chemin. Elle profitait des moindres instants avec lui. Son rôle ne se cantonnait plus à la maman, elle se devait d’être deux. Ce n’était pas facile tous les jours d’assumer cette double personnalité mais il était hors de question pour elle de flancher. Son fils n’avait rien demandé et déjà la vie lui avait été cruelle en lui ôtant toute une partie de sa famille. Ils n’étaient plus que tous les deux mais ils seraient forts, et rien ni personne ne les séparerait. Enfin, tout du moins jusqu’à son adolescence où, théoriquement, la moindre jupette l’éloignera de la maison mère. Emma sourit, on en était encore loin et puis pour l’heure, il fallait se dépêcher si elle ne voulait pas être en retard.
Il faisait déjà très chaud pour 8h00 du matin. Une chaleur étouffante et qui ne s’annonçait pas très rassurante.

Après un dernier bisou, elle traversa la rue, entra dans le supermarché et mit son uniforme. Sa dernière matinée de travail commença. Une matinée à mettre en rayon les différents produits, renseigner sur l’endroit où étaient les papiers toilettes, ou encaisser des tonnes et des tonnes de caddies.

***

Les nuages s’effilochaient dans le ciel bleu délavé. Ils paraissaient bien blancs par rapport aux grosses boules de coton grisâtres qui s’amoncelaient à l’horizon. Le soleil était encore haut perché, le clocher de Govirs sonnait seize coups.
Il faisait chaud, « 38 degrés » avait annoncé la météo et pas un souffle d’air ne pouvait rafraîchir quelque peu les habitants. Le calme avant la tempête, disait-on.
Le béton des immeubles et de la chaussée renvoyait les rayons de soleil et la chaleur semblait décuplée au fil des heures. Les automobilistes souffraient derrière leur pare-brise. Les passants tentaient désespérément de marcher sur les plus petites traces d’ombre. Mais les badauds étaient peu nombreux à flâner sur les trottoirs. Quelques personnes s’étaient réfugiées pour un temps dans le supermarché voisin. La climatisation avait beau être un sujet de discussion controversé chez les écologistes, elle mettait d’accord beaucoup de monde les jours de canicule. D’autres s’amoncelaient sur les terrasses des cafés, sous des parasols placebo, lunettes de soleil, polo léger pour les hommes, petite bride pour les dames, et grand verre d’une boisson quelconque, mais surtout très frais, à la main.
Govirs était une ville ouvrière, modeste et peuplée de gens encore plus modestes. Le quartier où résidait la jeune femme avait l’avantage de compter dans le même paramètre : son appartement, l’école, le supermarché et autres petits commerces bien utiles, un arrêt de bus et une gare ferroviaire... Sa vie se résumait à parcourir inlassablement les mêmes trottoirs, les mêmes boutiques et le même voisinage… autant dire un cercle très restreint.
La route qui traversait cette portion de ville était une nationale fréquentée, bruyante et puante. Une rue et deux pâtés de maison séparaient l’appartement d’Emma et le supermarché. Quelques arbres maigrichons ponctuaient les accotements, souffrant de la chaleur et de la sécheresse. Les bâtiments comptaient entre quatre et cinq étages, les murs relativement propres, sauf ici ou là, quelques gribouillis ou vestiges d’anciennes publicités. Un quartier sobre et convenable.
Elle habitait juste au dessus de la petite boutique de vêtements et du garage Martinez. Et en face, un restaurant kebab où trois hommes discutaient du prochain match de rugby local, abrités sous le feuillage relativement conservé d’un platane.
Pas très loin, une silhouette vaporeuse apparut, se glissant furtivement entre les façades et les recoins. Invisible pour les passionnés des « Ours de Govirs », elle se fondit dans l’ombre de l’arbre et se figea. Son regard perçant analysait déjà les moindres mouvements du trottoir d’en face. Sa cible était en vue.


***

Emma sortit du magasin, prenant son courage à deux mains lorsqu’elle traversa les portes automatiques. L’amplitude thermique la saisit à bras le corps en une étreinte suffocante. Une grimace volontaire étira ses traits, elle détestait ces périodes de canicule, cette chaleur, qui lui semblait de moins en moins naturelle. Le réchauffement de la planète ? Bien sur ! Et ce n’est pas le pauvre ours blanc sur sa minuscule plaque de glace dérivant au large qui la contredirait.
Sans perdre de temps, elle se mit en marche. La semaine de boulot était finie et déjà, ça c’était suffisant. Elle n’avait qu’une hâte, rentrer chez elle. Et comme le gentil petit extra-terrestre le dirait si bien :‘E.T-Maison’. Le timing était serré.

Elle sentait la sueur dégouliner par les moindres pores de son épiderme. Son tee-shirt lui collait à la peau, imprégné des effluves de la transpiration. Ses jambes menaçaient de flancher à tout moment, elle ne s’était assise en tout et pour tout qu’une dizaine de minutes depuis le petit déjeuner. Mais elle n’en avait cure. Son seul soucis était de porter tous ses sacs de victuailles au plus vite, avant que les anses en plastique ne lui scient les doigts. Et puis, elle n’avait pas le temps de s’apitoyer sur son sort, mais à peine celui de ranger ses courses avant de récupérer son fils à la maternelle.
La seule pensée de son petit bonhomme la fit sourire. Elle savait qu’il n’avait pas trop souffert de la canicule, jouant avec tous ses copains dans les petites piscines improvisées de l’établissement. Et après cette journée, déjà bien éprouvante, elle n’aspirait qu’à profiter de sa seule famille, à l’abri dans leur appartement.

Emma posa ses deux volumineux sacs sur le sol et farfouilla dans sa poche. La tête basse, profitant de ce répit fugace pour reprendre son souffle, un sourire balaya néanmoins son visage lorsque ses doigts trouvèrent de suite le trousseau. Avec un peu de chance, elle pourrait même prendre une petite douche rapide.
Elle débloqua le verrou et agrippa la poignée en métal de la lourde porte de son immeuble. Sa main glissa un peu, moite de sueur. Encore un peu, et elle perdrait jusqu’à deux kilos aujourd’hui, trois en comptant les escaliers ! Un soupir amusé s’échappa de ses lèvres, si seulement …
Bloquant la porte avec son pied, elle se ramassa pour prendre ses sacs. Une impression étrange la submergea soudainement. Elle tiqua. En plein après midi, au mois d’août, pourquoi faisait-il si sombre ? L’orage prenait-il de l’avance ?
Emma lança un coup d’œil furtif dans les vitres de la porte d’entrée et se figea de terreur. Une silhouette menaçante se découpait en contre jour. Elle ne distinguait que très peu de choses mais pu deviner, par sa carrure, qu’un homme se cachait sous cette cape sombre et poussiéreuse. Elle rassembla le peu de courage qui s’évaporait déjà, et tenta de se relever. Ses yeux s’habituaient vite à l’obscurité et aux contrastes. Elle examina de biais cet inconnu. La peur déversa ses torrents de bile et d’adrénaline dans tout son corps lorsqu’elle fut hypnotisée par ces yeux gris pailletés mais pourtant si sombres. Ses entrailles s’entremêlèrent quand elle aperçut un sourire narquois se dessiner au coin de sa bouche.
-« Bouh ! »
Emma sursauta en entendant cette voix si lointaine et si proche à la fois. Un cri s’échappa malgré elle.
-« Haaaaaaaa ! »
Terrifiée mais revêche à l’idée de ne pas faire face à son ennemi, elle pivota. Un craquement sourd, provenant de sa région lombaire, l’alerta mais cette information était loin d’atteindre ses priorités. Une main plaquée devant la bouche, elle réprima un deuxième hurlement, digne d’une fan de boys band surexcitée. Devant elle : rien. Enfin si : le trottoir, la rue, les voitures, la lumière éblouissante sur les vitres des magasins… Mais aucun homme. Comment avait-il pu disparaître aussi vite ? Y’avait-il eu seulement quelqu’un ?
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MessageSujet: Re: Crystal   Crystal Icon_minitimeLun 2 Juil - 7:57

Elle tourna la tête vivement de droite à gauche, scrutant les alentours mais personne. A part peut être les trois gugusses d’en face qui la regardait bouche bée. Elle s’empressa d’agiter les mains devant elle et de bredouiller suffisamment fort pour qu’il l’entende :
-« Y’avait quelque chose là ! … Non ? » Ajouta-t-elle, désirant en avoir le cœur net.
De concert, les trois hommes lui firent signe que non. La jeune femme ne sut si elle devait se sentir plutôt rassurée qu’aucun individu bizarre en cape noire, (ou un homme en imperméable jaune), ne la suive ou irritée, troublée. Parce que ce regard avait semblé si réel…
Elle réalisa subitement qu’elle devait paraître complètement ridicule. Et leur expression n’était pas difficile à deviner. La jeune femme se contrôla pour ne pas leur mettre un taquet et effacer cette moue moqueuse de leur visage. Elle ramassa ses affaires, entra dans l’immeuble et grimpa les escaliers aussi rapidement qu’elle put. Chez elle, passé le choc, elle se sentit soudainement toute flasque. Elle se serait volontiers étalée sur le sol si son instinct ne la pressait pas de réagir un peu.

Elle n’avait pas oublié ce bruit si caractéristique d’une vertèbre qui « craque », lors de son expérience dans la 4ème dimension. Elle savait qu’il ne lui restait plus beaucoup de temps. Et son dos se rappelait déjà à son bon souvenir. Ses muscles se raidissaient, et la jeune femme murmura un –« Oh non, pas maintenant. » sentant la souffrance envahir son corps. Elle connaissait que trop bien ces symptômes et voyant la crise arriver à grand pas, elle fit un effort désespéré pour aller le plus vite possible. Elle traîna ses sacs sur le linoléum de la cuisine, et les débarrassa de leur contenu, tout en se posant mille et une questions.
Elle se rabroua mentalement et rassembla des restes de lucidité. Elle regardait trop de série à la télé, un coup de chaud n’était pas impossible, et elle manquait de sommeil. Sinon comment expliquer cette…apparition ? Car il était impossible que ce soit un humain. Ou alors, il n’en restait pas grand-chose. Des yeux volants ? Elle finit par rire de sa paranoïa. Elle jeta un regard sur la pendule de la cuisine. 16 h 15. Il lui restait cinq minutes avant d’aller chercher le petit gars à l’école.
Une douleur vive, telles des myriades de piques chauffées à blanc, lui traversa les lombaires. Une grimace lui déforma les traits et elle s’empressa de s’asseoir. Le mal se propagea jusqu’au sommet du crâne.
Emma ne bougeait plus, ne pensait plus. Elle attendait. Ce n’était pas la première fois que cela lui arrivait, et par expérience, elle savait que la meilleure des choses à faire était de patienter jusqu’à ce la douleur devienne gérable. Elle respira profondément, tentant d’accélérer le processus. Quelques soupirs d’énervement ponctuaient ses respirations. Encore un grand moment de solitude. Elle réprima un cri de colère froide et de frustration intérieure, puis se releva.
Son premier geste : avaler quelques gélules miracles pour la soulager de ses maux de dos. Câlin, le seul remède capable de lui faire oublier ses crises. Il faudrait sûrement qu’elle aille consulter son rhumatologue-ostéopathe, (rien que ça !), pour se remettre d’aplomb mais au moins, avec ces anti-douleurs, elle pourrait patienter quelques jours et vaquer à ses occupations. L’arrêt de travail était inenvisageable, son salaire en pâtirait trop. En respectant au mieux sa forme physique restante, clopin clopant, elle débarqua devant la maîtresse impatiente et récupéra son fils. Et si elle pensait pouvoir savourer cette fin d’après midi tranquillement, elle ne put que la gérer tant bien que mal, en se ménageant autant que possible.



***


Enfin !
20 H 00. La journée s’achevait.
Son médicament faisait effet. Alléluïa ! Les courses étaient depuis longtemps rangées, le repas servi et la vaisselle égouttait. L’heure du bain était passée et le pyjama mis, et pour l’instant, la jeune femme tentait de maîtriser les accès de colère de son fils :
-« Veux pas aller faire dodo ! »
-« Si mon cœur. Comme tous les soirs. »
-« Non ! »
-« Ca suffit ! »
Sa voix se teintait d’impatience mais s’énerver contre lui n’arrangerait rien. Son caractère impulsif devait faire bien des concessions. Heureusement, son garçon semblait avoir perçu l’agacement de sa mère car il se calma aussitôt. L’absence d’une présence masculine, d’une autorité autre, manquait terriblement mais elle n’avait pas le choix…
Après un gros câlin et plein de bisous, elle ferma la porte de la chambre de son fils, un soupir de soulagement aux lèvres. S’asseoir, se reposer étaient ses priorités. Et c’est ce qu’elle fit, non sans avaler d’autres anti-inflammatoires. Puis elle s’affala dans son canapé et un soupir interminable s’échappa de sa bouche.
-« Pfffffffffffff… il était temps. J’en peux plus ! »
Elle jeta un regard inquisiteur à la fenêtre, les gros nuages noirs qui avaient nargués la population toute la journée, s’amoncelaient maintenant au-dessus de leur tête. Et si la violence d’un orage se mesurait à la noirceur du ciel, pour sur, il allait faire du bruit. Mais il ne pleuvait pas encore. Un sourire espiègle rajeunit son visage :
-« Avant que ça éclate, je vais m’amuser un peu. »
Elle se reprit à deux fois avant de pouvoir se relever :
-« Une vraie mamie… » Souffla-t-elle, aigrie.
La jeune femme alluma sa console et ouvrit la fenêtre. La masse nuageuse qui obscurcissait le ciel était impressionnante. Au loin, quelques éclairs zébraient l’horizon. La chaleur était accablante. Oui, l’orage n’allait pas tarder, elle l’espérait de tout cœur. Avec un peu de chance, l’atmosphère se rafraîchirait un tantinet et la nature avait besoin d’eau de toute urgence.
Néanmoins, en attendant le spectacle, elle se rassit et chargea sa sauvegarde. La première image qui apparut, n’était pas la balise de sauvegarde comme elle s’y attendait, mais la silhouette du monstre de la dernière fois.
Emma tiqua et ses sourcils se froncèrent. Ce fut sceptique qu’elle reprit le contrôle de son personnage quand la représentation s’effaça. Devait-elle reprendre tout de suite depuis le début afin de s’assurer s’il y avait vraiment un bug dans le jeu, ou continuer sa progression, en risquant de perdre beaucoup de temps ? Elle haussa les épaules et décida de voir ce qui allait se passer. De toute façon, elle devait se coucher tôt afin de préserver le peu de muscles fiables qui lui restait.
Si la jeune femme avait cru vivre une journée difficile, il n’était pas dit que la soirée allait être plus clémente.
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MessageSujet: Re: Crystal   Crystal Icon_minitimeLun 2 Juil - 7:58

Chapitre 4



Dame Ewalyne, personnage principal de ‘Crystal’, commençait l’aventure sans expérience ou presque. Son compagnon, Seigneur Amaury, était par contre un chevalier émérite. Emma adorait les jeux de rôle.
Ils venaient de rencontrer un troisième personnage, Professeur Wilhem Prokkhe. Ils se trouvaient dans une cabane en bois, qui se situait elle-même dans une forêt. Pour l’instant, la démo de cette réunion passée, Emma pouvait gérer son personnage en totale liberté. Elle entreprit de fouiller la pièce et de vider quelques tiroirs, à l’affût de quelques potions, ou autres objets magiques. Puis, elle sortit de la maison et en fit le tour. Le paysage était tout simplement magnifique, la texture des végétaux admirable. Elle se concentra sur sa manette quand l’écran devint flou et que la musique de combat habituelle retentit. Un gros serpent ! En quelques tours, elle réussit à le vaincre. Emma pouffa quand elle repensa à son rêve. Tout était plus simple, bien calée dans son canapé.
Elle rencontra d’autres reptiles et prit quelques niveaux. Ce n’était pas une activité très productive, diront certains, mais pour la jeune femme, cela lui permettait simplement de passer un bon moment. Et puis, qu’importe le moyen si cela lui évitait de penser, et surtout de se souvenir.
Elle jeta un coup d’œil sur la pendule et même s’il n’était pas très tard, ses bâillements successifs étaient une prière suffisamment convaincante. Un éclair fort lumineux apparut dans son champ de vision et lui suffit à se décider d’aller sauvegarder immédiatement et d’éteindre la console. Le bruit du tonnerre fut assourdissant. Emma espéra avoir un peu de temps avant que la pluie ne tombe et inonde son salon.
Quand elle entendit les premières notes d’un assaut imminent, elle grogna. Et quand un dragon de deux mètres de haut et crachant des flammes (ne ressemblerait-il pas au dragon de son rêve ?) apparut, elle explosa :
-« Oh ! Mais c’est pas vrai ça ! La poisse ! »
Elle appuya sur la touche ‘fuir’ mais aucune réponse. Le dragon s’approchait et la jeune femme voyait déjà son heure d’entraînement et de prise de niveau réduit à zéro. L’écran sauta plusieurs fois et se brouilla. Emma ne se fit pas prier, elle se leva et dans un grognement énervé, elle éteignit sa console. Aucun bruit suspect venant de cette dernière ou de la télévision. Curieuse, elle ralluma sa console et attrapa sa manette. Elle se tenait accroupie, pratiquement sous l’écran. Lorsque sa partie commença, le dragon se tenait devant son personnage, toutes griffes dehors, sans parler des crocs et autres flammèches sortant de sa gueule béante. Emma appuya sur la touche ‘on/off’ de la machine, dépitée. Ce jeu dysfonctionnait complètement, il n’y avait pas d’autres explications possibles.
-« Bon et bien, plan B. Dodo. »
L’apparente sérénité avec laquelle Emma appréhendait la situation ne reflétait en rien ses véritables sentiments. Elle bouillonnait. Quelle journée pourrie ! Et elle ressemblait que trop à toutes les autres. Elle avait envie de tout jeter par la fenêtre. D’hurler sa haine et sa rancœur. Mais à quoi cela servirait ? Elle avait appris à intérioriser sa colère depuis le temps.
Les yeux encore rivés sur le boîtier de jeu, une moue déçue plaquée sur son visage, elle se releva doucement et fit un pas. Un seul.
Une large main s’abattit soudainement sur sa bouche. Une autre l’empoigna fermement. Son sang ne fit qu’un tour. Elle se figea, terrifiée. Qu’est-ce que … ?
-« Je relâcherais ma prise si vous me promettez de ne pas crier. » Susurra une voix masculine à son oreille.
Le timbre grave, mi amusé, mi effrayant, finit de la glacer complètement. Par tous les moyens, elle tentait misérablement de ne pas s’évanouir ou de s’oublier sur son lino. Thomas ! Pourvu que ce taré ne touche pas à son fils. Elle frissonna Elle avait grandi dans une banlieue relativement modeste mais surtout désespérée. Avec toutes les recommandations et les peurs cachées de ses parents, elle connaissait depuis son plus jeune âge les dangers de ces rencontres inattendues. Elle n’aurait jamais pensé cependant à être prisonnière de son propre appartement. Elle n’avait pas beaucoup d’espace pour évoluer. La fuite lui semblait malheureusement impossible, à moins de sauter par la fenêtre, et la lutte inévitable. Car elle ne se laisserait pas faire. Oh que non ! Il ne s’approcherait pas de son fils. Et qu’il essaye de la toucher tiens ! Qu’il essaye !

Emma hocha la tête et sentit aussitôt une certaine liberté de mouvement. La jeune femme osa se retourner, non sans jeter un coup d’œil à la porte d’entrée. Les clefs pendouillaient à la serrure, immobiles. Elle n’avait rien entendu, aucune effraction, aucune trace. Comment diable cet homme avait-il pu entrer chez elle ? La fenêtre ? Impossible, il aurait du escalader quatre étages ! Qui était-il et que lui voulait-il ?
Elle fit face à son agresseur et planta son regard dans le sien.
-« Aaa… ! »
Son cri mourut en un borborygme, des doigts puissants écrasaient de nouveau sa bouche.
-« Et bien ! Et bien ! Vous m’aviez promis, il me semble. Pffff, si ça commence comme ça… »
Mais les yeux encore agrandis d’effroi, la jeune femme n’aurait pour rien au moindre accordé sa confiance à ces yeux si étrangers et familiers à la fois. Etait-elle en train de perdre la tête ? De rêver ? Elle se serait bêtement endormie devant sa télévision et elle rêvait du même individu mystérieux qui l’avait hanté tout à l’heure. Et vue qu’il ressemblait au personnage de son jeu, l’hypothèse serait plausible…
Elle en était là de ses réflexions quand l’inconnu leva sa main gauche et lança d’un ton jovial :
-« Ravi de vous retrouver enfin. Et puis, je sais l’effet que je fais aux femmes.» Rajouta-t-il espiègle.
Les épaules d’Emma s’affaissèrent sous l’effet de surprise. Qu’est-ce que … ?
Elle le fixa du regard et de nouveau ses entrailles se tordirent. L’homme qui se cachait sous sa capuche poussiéreuse, la toisait avec un aplomb exagéré. Elle se sentait jugée, étudiée.
-« Bon, c’est pas que, mais il faut y aller. Je ne peux pas m’éterniser. »
Il avait hâte de commencer les hostilités. Emma vit son regard se durcir, son sourire se fit carnassier.
Il pencha la tête et observa la jeune femme gravement, puis, comme si de rien n’était, il reprit un visage plus sympathique et joignant le geste à la parole :
-« Et puis ça empeste ici. Je me demande comment vous faites pour vivre dans cette puanteur » s’exclama-t-il en faisant mine de chasser quelques mauvaises odeurs.
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MessageSujet: Re: Crystal   Crystal Icon_minitimeLun 2 Juil - 7:58

Les yeux écarquillés devant ce changement instantanée d’humeur, elle n’en oublia pas moins que cet homme devait être on-ne-peut-plus dangereux. D’instinct, Emma se ramassa sur elle-même, prête à se débattre de toutes ses forces. Les battements de son cœur s’affolaient de plus belle. Elle avait peur, certes, mais l’attitude de cet homme l’enrageait. Et elle avait peur pour son petit bonhomme. Elle ferait tout pour qu’il reste dans cette pièce et gagner du temps s’imposait.
-« Je ne vous permet pas ! » essaya-t-elle d’articuler le plus clairement possible, malgré la pression des doigts sur ses lèvres. Ce qui donnait quelque chose comme –« Che ne fou permeu po. »
Il l’ignora superbement, et continua son petit manège en secouant sa main devant son nez. Puis, la toisant du regard, il lança à brûle pourpoint :
-« Je la voyais un peu plus appétissante la Dame Ewalyne. »
Emma était habillée simplement d’un tee-shirt long et d’un pantacourt sans aucune forme. Elle se savait loin des top model ou des représentations de la femme moderne mais … Comment osait-il ? Une force, inconnue jusqu’alors, la submergea. Elle assimila ce sentiment à une colère froide qui l’aida à rassembler ses esprits et même à remettre sa matière grise en état de fonctionnement. Elle se sentait happée par cette sensation primaire et sauvage et s’y abandonna totalement. Elle fronça les sourcils, déterminée à sauver sa peau. « Que je trépasses si je faiblis. » Elle emprunterait cette réplique à Godefroy le Hardi et vaille que vaille !
Emma se débattit de toutes ses forces et réussit à se libérer partiellement.
-« Qu’est-ce que vous voulez ? » Lui cracha-t-elle, furibonde.
Le plus naturellement du monde, il sortit un poignard de son fourreau, et claironna :
-« Je vous tue et on y va. »
Il gardait une attitude tellement naturelle malgré le drame de la situation. Il maîtrisait parfaitement sa force et savait jusqu’à quel point il pouvait appréhender sans mal la jeune femme. Celle-ci, horrifiée, ouvrit grand la bouche face à l’horreur de la situation. Mais aucun son ne sortit de sa bouche.
Debout, la dépassant allègrement d’une tête, l’homme leva son index et déclama dans un sourire :
-« Ne vous méprenez pas, je suis un artiste, moi ! Aucune douleur. Je vous le garantis. »
Emma sentit ses entrailles se tordre et son cœur s’affola, lorsque la lame se posa sur son cou. Sa lucidité s’effilochait en lambeaux de pensées incohérentes.
Son regard se voila. La jeune femme lutta pour ne pas sombrer dans les ténèbres qui l’envahissaient peu à peu. La silhouette de son meurtrier devenait de plus en plus floue. Son esprit s’embruma et s’éteignit sur une dernière vision : le visage de son fils.
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